Niger : le bras de fer entre pouvoir et acteurs de l’éducation met en péril l’école
Grèves perlées des étudiants et enseignants pour arriérés de bourses pour les uns, salaires, problèmes de recrutement et résiliations abusives des contrats pour les autres ou encore interdiction d’accès aux cours aux boursiers de l’enseignement professionnel pour non-paiement par l’Etat de leurs frais de scolarité : l’éducation connaît un réel malaise au Niger.
Née du bras de fer entre les autorités de tutelle et les différents acteurs de l’éducation, qui a gangrené le secteur à tous les niveaux, cette situation risque si l’on ne prend pas garde de mettre en péril le système éducatif dans son ensemble. Et à l’allure où vont les choses, aucune partie ne semble vouloir faire de concession.
Depuis la rentrée, les enseignants observent des grèves à répétition, presque toutes les deux semaines, sur tout le territoire à l’appel de leur coordination syndicale qui réunit CAUSE-Niger et le SYNACEB. Une situation qui résulte, selon les syndicalistes, du non-respect par le gouvernement des engagements auxquels il a souscrit dans le protocole d’accord conclu le 13 décembre 2016.
Il s’agit notamment du payement à terme échu des salaires des enseignants contractuels à partir de janvier 2017 et la finalisation des recrutements de 2012-2013 et 2013-2014 prévue pour la fin mars 2017.
Au lieu d’appliquer ses engagements, dénonce la coordination, le gouvernement a préféré se livrer notamment à “des résiliations abusives des contrats de plus de 13.000 enseignants, sur la base d’une évaluation illégale”, et à de nouveaux recrutements trois mois après la dernière rentrée des classes “en lieu et place d’enseignants expérimentés”, alors “qu’au même moment des centaines d’enseignants sont abusivement affectés à l’intérieur du pays”.
Il s’agit là pour les syndicalistes “de provocations graves”. “Devant la mauvaise foi de la partie gouvernementale, nous n’avons d’autre option que de poursuivre la lutte jusqu’à satisfaction totale de nos revendications”, ont-ils martelé dans une déclaration.
De son coté, l’Union des scolaires nigériens, après plusieurs ultimatums adressés au gouvernement, a renoué avec la contestation par des boycotts de cours et des marches suivies de meetings sur les campus, puis dans les rues de la capitale. Elle a dit “rendre responsables les autorités concernées de tout ce qui adviendra dans les jours à venir en cas de non satisfaction”.
Ces revendications concernent une amélioration de leurs conditions de vie et d’études, les arriérés de bourses, le retard constaté dans la rentrée au secondaire et dans les universités publiques, le retard académique avec pour conséquence “l’entassement de plusieurs promotions dans le même niveau”.
Les différents arrêts de travail des enseignants-chercheurs, à l’appel de leur syndicat, également pour des raisons pécuniaires, paralysent davantage les activités académiques dans les huit universités publiques du pays.
Pour leur part, ils exigent notamment du gouvernement le paiement intégral des arriérés de salaires et primes de recherche, l’application des textes organiques des universités de Zinder, Maradi et Tahoua, adoptés en juillet 2017, et la sécurisation dans tout le pays des sites affectés aux universités publiques.
Depuis lundi, les enseignants et personnels techniques de l’université de Maradi (centre) observent une grève de cinq jours pour obtenir le paiement intégral de leurs arriérés de salaires.
Mais le coup de grâce vient d’être porté par les promoteurs des écoles et instituts professionnels avec l’interdiction, depuis le 15 janvier dernier, de l’accès des étudiants boursiers de l’Etat aux salles de classes en raison d’arriérés des frais de scolarité non honorés par le gouvernement.
Pour Hamadou Hamidou, fondateur d’un institut professionnel à Niamey, c’est la situation financière difficile que vivent depuis près de deux ans leurs établissements, à cause notamment du non-paiement par l’Etat des frais de scolarité, qui les a contraints à prendre cette grave décision.
En soutien à leurs camarades boursiers, l’Union des étudiants des écoles et instituts professionnels a appelé l’ensemble des étudiants des établissements professionnels à un arrêt “illimité” des cours, jusqu’à satisfaction.
Tout en dénonçant le silence des parents d’élèves face à cette situation, ils ont appelé le président Mahamadou Issoufou à s’investir personnellement dans le règlement de cette crise qui, à la longue, mettra en péril l’avenir de la nation.
En attendant, toutes les parties concernées campent chacune sur leurs positions, faisant courir au pays le risque d’une année blanche certaine.
Avec Agence de presse Xinhua
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