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Rapport du président Issoufou Mahamadou du Niger, champion de l’Union Africaine pour la zone de libre-échange continentale (ZLEC) lors de la 30ème session ordinaire de l’Union Africaine

Excellence Monsieur le Président de l’Union africaine, Président Paul Kagamé  de la République du Rwanda, Excellences, Mesdames et Messieurs les Chefs d’État et de gouvernement, Excellence, Monsieur Moussa Faki Mahamat, Président de la Commission de l’Union africaine, Honorables Délégués, Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux de vous présenter mon deuxième Rapport d’étape sur nos efforts visant à établir la zone de libre-échange continentale africaine depuis que vous m’avez honoré du suivi de ce processus.

Vous vous souviendrez que dans mon dernier rapport de juillet 2017, j’ai rappelé le contexte du processus de la ZLEC et fait état des réalisations et activités pour la période de juin 2015 à juin 2017. J’ai également présenté quelques recommandations sur la façon de faire avancer le processus de la ZLEC.

Excellences
Dans la même optique, j’ai l’honneur de présenter ce jour, devant cet auguste Assemblé, le rapport d’étape semestriel couvrant la période de juillet à décembre 2017 ainsi que les perspectives.
Je voudrais tout d’abord mentionner les progrès accomplis au cours des six derniers mois :
Je suis heureux d’annoncer que des activités importantes ont été menées. Il s’agit principalement :
a. des consultations avec les sept pays qui ont formulé des réserves sur le niveau d’ambition de la libéralisation de 90% sur le commerce des marchandises ;
b. des 7ème et 8ème réunions du Forum de négociations de la ZLEC, dont les résultats ont été positifs ; et c. de la 4e Réunion des ministres du Commerce de l’Union africaine.

Excellences, concernant les résultats des consultations avec les sept pays qui ont formulé des réserves sur le niveau d’ambition de la libéralisation du commerce des marchandises
J’ai, par le biais de mes délégués, mené des consultations fructueuses avec les représentants des chefs d’État et de gouvernement des pays respectifs, en marge de la réunion de l’Assemblée Générale des Nations Unies à New York, en septembre 2017. Afin de garantir une prise en charge conséquente de ces préoccupations légitimes, qui constituaient un point de blocage du processus, j’ai adressé des lettres aux sept chefs d’État des pays concernés, je me suis rendu personnellement auprès de mes frères Chefs d’État et de Gouvernement de deux pays  et j’ai eu des apartés, en marge des rencontres internationales avec les collègues de trois autres pays, pour leur exprimer de vive voix la compréhension et la solidarité de l’ensemble du continent relativement à ces questions.
Les consultations ont donné les résultats suivants :
– premièrement : sans préjudice du niveau d’ambition de 90% approuvé par le 29ème Sommet ordinaire des Chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine (UA), les 3 et 4 juillet 2017, et en guise de solution de compromis, le Groupe des Sept (7) va commencer la mise en œuvre de la libéralisation tarifaire, exceptionnellement, à un niveau d’ambition de 85% à l’entrée en vigueur de la ZLEC ; et
– deuxièmement : éliminer graduellement les droits de douane à 0% pour les produits concernés, sur une période de 15 ans, pour atteindre un niveau d’ambition de 90%, conformément à une « matrice de mise en œuvre » qui sera déterminée par ces 7 pays. Cette matrice de mise en œuvre doit être annexée à leur liste de concessions sur la ZLEC en ce qui concerne le commerce des marchandises. À cet égard, il ne doit pas y avoir d’écart par rapport aux modalités négociées et approuvées pour les « produits sensibles » et « la liste d’exclusion ».
Un compte rendu des résultats de cette consultation a été fait plus tard, dans un esprit de transparence, aux négociateurs en chef. Certaines préoccupations ont été exprimées sur la manière dont les flexibilités accordées aux sept pays pourront avoir un impact sur les produits sensibles et d’exclusion. Suite aux explications, il a été convenu que tous les États membres de l’UA aient accès à ces deux catégories qui seront mises en œuvre par des négociations.
Il a été précisé que les pays les moins avancés (PMA) ont 15 ans pour se conformer en gardant à l’esprit que l’enjeu est la construction d’un marché unique pour l’Afrique. Il a été également convenu d’assurer la mise en œuvre sur une base exceptionnelle, au cas par cas et de manière transparente.
Mon ministre du Commerce a reçu de son homologue de la République Fédérale Démocratique d’Éthiopie, une communication indiquant la position du groupe des sept et a par l’entremise du Commissaire au Commerce et à l’Industrie de l’Union africaine, transmis cette communication au Président du Forum de négociations afin de recueillir des commentaires appropriés. Le consensus final sur cette question fera partie de l’agenda intégré.
S’agissant des Résultats des 7e  et 8e forums de négociation de la ZLEC Je voudrais souligner que deux dernières réunions cruciales du Forum de négociation de la ZLEC, tenues du 2 au 7 octobre 2017 à Addis-Abeba et du 20 au 25 novembre 2017 à Abuja respectivement, ont permis d’enregistrer des progrès significatifs et une évolution vers une convergence en ce qui concerne les textes juridiques et leurs annexes. Les principaux résultats sont :   i. Il a été recommandé de lire le titre du texte juridique comme suit « Accord portant création de la Zone de libre-échange continentale africaine ».
ii. Le traitement spécial et différencié ainsi que la géométrie variable ont été des principes clés de l’Accord et il a été convenu qu’étant donné que presque tous les pays africains sont confrontés à des défis de nature diverse, cette question sera traitée au cas par cas, dans les protocoles et les annexes spécifiques y afférents afin que les engagements pris dans le cadre de la ZLEC ne soient pas sapés ni compromis.

iii. Il existe une clause de rendez-vous / un agenda incorporé dans le commerce des marchandises et des services à remplir après la signature de l’accord.
iv. L’accord et ses annexes doivent être adoptés par la Conférence et soumis à la signature et à la ratification ou à l’adhésion des États membres conformément à leur législation nationale ; et
v. Il a été convenu que l’Accord et les Protocoles relatifs au commerce des marchandises, au commerce des services et aux règles et procédures de règlement des différends entreront en vigueur trente (30) jours après le dépôt du quinzième (15e) instrument de ratification.  vi. Il a également été convenu que seuls les États parties à l’Accord (ceux qui l’ont signé et ratifié) participeront à la gouvernance de la Zone de libre-échange continentale africaine.  Permettez-moi, Excellences, de vous présenter les conclusions de la quatrième réunion des ministres du Commerce de l’Union africaine.  Mon gouvernement a également accueilli la quatrième (4e) réunion des hauts fonctionnaires chargés du commerce et la 4e réunion des Ministres du Commerce de l’Union Africaine à Niamey, au Niger, du 1er au 2 décembre 2017. J’ai, encore une fois, pu aborder et reconfirmer aux Ministres, en sessions plénières et à huis clos, l’importance de respecter la date butoir de la création de la Zone de Libre-Echange Continentale. J’ai également apporté mon soutien total aux Ministres dans leurs négociations cruciales et importantes. Les Ministres ont pris une décision cruciale et stratégique sur les questions qui taraudent les négociateurs.
La réunion de Niamey, tenue en décembre 2017, a permis de conclure l’Accord portant création de la Zone de Libre-Echange Continentale Africaine et le Protocole sur le commerce des services qui sont prêts à être soumis aux Chefs d’État et de gouvernement pour approbation. Une fois que ces instruments auront été approuvés, les domaines de l’agenda incorporé, en particulier ceux du Protocole sur le commerce des services relatif aux engagements spécifiques et le cadre réglementaire, pourront être mis en œuvre.

Excellences,
L’Accord portant création de la Zone de Libre-Echange Continentale Africaine prévoit dans ses différentes dispositions légales, des structures de surveillance et d’administration de la ZLEC. Je vais en souligner quelques-unes :
i) À sa tête, la ZLEC Africaine est dirigée, par la Conférence des Chefs d’État et de gouvernement qui en assure la supervision générale et l’orientation politique stratégique.  ii) Le Conseil des ministres (composé des ministres africains du Commerce) prend des décisions sur toutes les questions relevant de la ZLEC ; et les transmet à la Conférence lorsqu’il le juge nécessaire.  iii) Sous le Conseil des ministres, il y aura également le Comité des hauts fonctionnaires du commerce composé des Secrétaires Permanents ou Généraux ou des Directeurs Généraux chargés du commerce qui exécuteront les décisions du Conseil.  iv) Il y aura le « Secrétariat de la ZLECA » qui sera chargé de coordonner la mise en œuvre de l’Accord de la ZLEC africaine et les décisions des institutions de surveillance. Ledit secrétariat disposera d’un organe institutionnel autonome doté d’une personnalité juridique indépendante au sein du système de l’Union Africaine. La structure, les rôles et les responsabilités du Secrétariat seront déterminés par le Conseil des ministres. Ce même Secrétariat sera dirigé par un « Directeur Général » ou un « Secrétaire Général ». Les consultations se poursuivent pour aboutir à un consensus sur le titre du Directeur Général de la ZLEC africaine dont le rang proposé est équivalent à celui de Vice-président de la Commission de l’Union Africaine.  v) Étant donné que ces dispositions auront des incidences financières, la Commission de l’Union Africaine a reçu mandat d’élaborer une note technique sur les mesures institutionnelles proposées, qui mettront en évidence, entre autres, la relation avec la structure de l’Union Africaine et les incidences financières.
vi) Il reste encore tout un travail à effectuer pour finaliser le Protocole sur le commerce des marchandises et ses annexes, ainsi que le Protocole sur les règles et procédures de règlement des différends au sein de la ZLEC Africaine. C’est la raison pour laquelle la feuille de route a été amendée et un calendrier des réunions couvrant la période de janvier à mars 2018, a été élaboré et approuvé par nos Ministres du Commerce.  Comme je l’ai mentionné plus tôt, Excellences, les projets de documents finaux qui vous seront soumis pour examen et approbation sont les suivants : l’Accord portant création de la Zone de Libre-Echange Continentale Africaine et le Protocole sur le commerce des services.  Après la finalisation du travail additionnel sur les deux autres Protocoles sur le commerce des marchandises et le mécanisme de règlement des différends, l’Accord portant création de la ZLEC et les trois Protocoles seront prêts à être soumis pour approbation et signature d’ici à mars 2018.  Excellences, À cet effet, j’aimerais réitérer ma conviction que la ZLEC Africaine et l’agenda de l’intégration économique ne devraient pas concurrencer d’autres thèmes de notre programme déjà surchargé du Sommet. À cet égard, je recommande à la Conférence que nous tenions un Sommet extraordinaire vers la fin du mois de mars 2018, période au cours de laquelle, l’Accord portant création de la ZLEC et les trois protocoles seront prêts à être soumis pour approbation et signature. Conformément aux procédures établies, je vous invite

Excellences, à vous entendre sur le lieu et la date du Sommet extraordinaire.  L’Accord portant création de la ZLEC africaine permettra de changer la donne pour l’Afrique et le peuple africain. C’est un accord qui aura un impact économique considérable et positif sur nos populations et le continent en général. Grâce à cela, nous créons un marché unique qui stimulera l’industrialisation, la diversification économique et le commerce. Ce sera également un instrument qui va nous rassembler et nous permettre d’élaborer un agenda commun pour que « l’Afrique parle d’une seule voix et agisse à l’unisson, tout en misant sur nos points forts dans le cadre de nos engagements commerciaux et diplomatiques avec le reste du monde ».
Pour être forts à l’étranger, nous devons d’abord être forts chez nous. Nos réalisations économiques à l’échelle nationale constituent l’un des éléments qui vont nous permettre de générer cette force tant désirée. Par conséquent, la signature, la ratification puis la mise en œuvre de l’Accord par nous tous sont fortement recommandées.
Excellences, je voudrais, à ce sujet, vous prier instamment de commencer à élaborer des stratégies au niveau national pour la signature et la ratification de l’Accord et de ses Protocoles. Ce sera une réussite historique et significative si nous devenons tous des membres fondateurs de la ZLEC Africaine.
Excellences, je vous prie également, humblement mais avec ferveur, d’exhorter vos ministres respectifs du Commerce à considérer la ZLEC Africaine comme leur priorité absolue. Ils doivent, à cet égard, assister à toutes les réunions des ministres du Commerce de l’Union Africaine.
Les trois prochains mois seront consacrés à instruire vos ministres du Commerce respectifs pour qu’ils entreprennent des activités de sensibilisation à l’échelle nationale afin que tous les ressortissants des pays africains soient pleinement conscients des efforts déployés pour établir la Zone de Libre-échange Continentale. Cela permettra, à nouveau, de faciliter une ratification plus rapide de l’instrument juridique de la ZLEC dès sa signature.

Excellences
En conclusion, je voudrais réaffirmer que compte tenu du peu de progrès réalisés dans les négociations commerciales multilatérales au niveau mondial, nous devons mettre davantage l’accent sur le renforcement de notre intégration économique et, la Zone de Libre-Échange Continentale Africaine est la seule institution qui nous permettra d’avancer dans cette direction. L’absence manifeste de consensus sur de nombreuses questions lors de la 11ème Conférence Ministérielle de l’Organisation Mondiale du Commerce qui s’est tenue en Argentine le mois dernier est un signal clair que nous devons rechercher plus d’opportunités commerciales au-delà du système commercial multilatéral. Pour cela, nous devons déployer des efforts concertés pour faire de la ZLEC Africaine, une réalité. Je tiens à préciser ce qui suit :
a. Ce que les Africains n’arrivent pas à obtenir dans le système commercial multilatéral peut l’être grâce à la ZLEC Africaine, car c’est une plate-forme qui offre d’énormes opportunités.
b. La ZLEC nous donnera également l’occasion de formuler et de renforcer nos positions panafricaines lors des négociations entre l’Afrique et le reste du monde.
c. La transformation économique des économies africaines grâce à l’industrialisation stimulera la compétitivité et placera ainsi notre économie intégrée dans une position plus forte pour accroître sa part dans les flux commerciaux mondiaux.
d. L’expansion de la production et du commerce dans le cadre de la ZLEC Africaine permettra d’augmenter en retour, les possibilités d’emploi pour nos jeunes, ce qui limitera leur migration et leur exposition aux dangers de la traite des êtres humains et de l’esclavage moderne.
Nous avions fixé un objectif ambitieux et nous sommes à la phase finale du premier cycle des négociations de la ZLEC. Nous devrions tous être fiers de nous-mêmes. Nous sommes au service de nos peuples et de notre continent en général et c’est le début d’une nouvelle ère où nous pourrions faire mieux. Attelons-nous à renouveler notre engagement à réaliser tous les projets de l’Agenda 2063 de l’Union Africaine.

En ce qui concerne les questions de l’industrialisation et du développement des infrastructures, cause de l’hésitation de certains États, je voudrais rappeler que la ZLEC forme avec les autres plans et programmes de l’Union Africaine, un tout cohérent dans la perspective de renforcer l’intégration régionale et atteindre les objectifs de l’agenda 2063. Je citerai pour rappel les plans et programmes suivants :
• Le Plan d’action pour le développement industriel accéléré de l’Afrique (AIDA), • le programme de développement de l’infrastructure en Afrique (PIDA),
• le programme détaillé de développement de l’Agriculture en Afrique (PDDAA) ; • la vision Minière Africaine (VMA) ; • le plan d’action pour l’intensification du commerce intra-africain (BIAT).
Pour conclure retenons cette citation du roi Guezzo : « si tous les enfants du pays venaient, par leurs mains assemblées, boucher les trous de la jarre percée, le pays sera sauvée ». C’est l’unité de l’Afrique qui permettra de sauver notre continent et qui permettra à nos peuples de jouir pleinement de leur richesse.
Je vous remercie.

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